Tout Burundais qui a l’opportunité de sortir de son pays pour l’étranger est considéré comme un chanceux, un potentiel richissime. Pourtant, ce n’est pas toujours vrai, et rester dans ce pays peut générer de multiples opportunités. Chance à celui qui sait en profiter.
Vers la fin de 2019, l’Association Umunyinya en partenariat avec UNICEF a lancé TURASHOBOYE, un projet d’émancipation socioéconomique des adolescents et jeunes en provinces de Rutana, Cankuzo et Ruyigi. Le projet prend ses sources dans l’analyse de la situation politico-sociale et économique du Burundi ainsi que la place des adolescents et jeunes dans la transformation de l’économie du pays ou les conflits qui peuvent naitre des divergences entre différentes parties.
Une étude qui a connu une large participation des jeunes et le Ministère de la Jeunesse, a été conduite en 2017 sur la résilience communautaire des jeunes au Burundi face aux conflits sociopolitiques. Cette étude confirme en effet que l’une des causes des crises cycliques et de la faible capacité de résilience chez les jeunes réside dans la méthode de transmission aux jeunes générations de l’histoire du Burundi, méthode qui est très souvent partisane, contribuant ainsi à perpétrer le cycle de frustration au sein des nouvelles générations.
Ceci ne dit pas que notre position est que tout le monde doit avoir une lecture Biblique de l’histoire, nous sommes très pour la diversité de la pensée et la pluralité de l’histoire pour vivre dans une société qui reconnait que le vivre-ensemble n’est pas forcement l’inhibition de la pensée minoritaire, mais que c’est la capacité de marcher ensemble en priorisant l’intérêt général. Nous avons intérêt à assumer les différences et assurer leur cohabitation.
Comme le dit l’auteure Nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, c’est très dangereux d’avoir une seule version, une pensée unique sur une situation, sur un peuple, parce que nous courons le risque de généraliser les situations tomber dans le piège de sombrer dans l’ignorance et agir de façon inappropriée. L’instrumentalisation des jeunes avant et après les élections expose ceux-ci à des violences dont ils sont souvent les premières victimes et parfois les acteurs volontaires ou involontaires. La crispation et le manque de résilience des jeunes d’aujourd’hui sont liés à la façon traumatique de présenter et de percevoir l’histoire du pays, avec, d’un côté les victimes et de l’autre les bourreaux, donnant ainsi aux uns l’envie de se venger sur les autres. Le présent projet vise à aider les adolescent(e)s et jeunes à chercher une orientation de la résolution des conflits intergénérationnels au Burundi avec une lecture constructive et apaisée du passé du pays. Il vise aussi à aider cette force vive à être utilisée rentablement pour créer des communautés plus prospères et paisibles.
En collaboration avec l’administration locale, Umunyinya asbl a mis en place 630 groupements de solidarité sur les collines, parmi lesquels deux personnes, un garçon et une fille étaient choisis par les membres pour suivre des modules de formation sur les compétences de vie du 21ème siècle (CV21) et le design thinking pour booster les capacités d’innovation sociale.
Le projet valorise beaucoup l’apprentissage et le transfert des compétences ; c’est ainsi que pour passer la formation, Umunyinya a formé les deux représentants qui ont à leur tour partagé les compétences acquises aux membres de leurs groupements. Les membres des groupements de solidarité devraient d’abord être sans emploi fixe, avoir arrêté l’école ou n’y avoir jamais été, ceci pour travailler avec les personnes avec un accès aux opportunités de développement très limitées.
A travers ces modules de formation, les bénéficiaires du projet ont essentiellement appris à développer leur estime et oser commencer, considérer les challenges comme des opportunités de secouer le cerveau et penser à l’extérieur de la boite, sortir de la zone de confort et mettre en activité les capitaux primaires dont ils disposent à savoir : la confiance, les ressources naturelles, l’unité. Les membres des groupements ont commencé à travailler en commun sur des petits projets agricoles, à épargner ensemble, et petit à petit des projets de commerce et d’élevage ont vu le jour.
Le chemin vers le développement n’est pas qu’une piste toute faite… il y a des nids de poule, il y a des coupures de pont, des embuches…tous ces groupements n’ont pas pu survivre les rumeurs que « les associations viennent regrouper les gens, leurs appeler à cotiser pour enfin disparaitre avec leur argent comme nous l’avons entendu dans la commune de Bukemba à Rutana ; certains n’ont pas toujours guéri de l’ancienne pratique toxique de certaines organisations de distribuer des vivres, de l’argent, du bétail ou du matériel aux bénéficiaires des projets, ce qui freine leur capacité de se lancer, d’utiliser leur potentiel créatif.
Au cours du projet TURASHOBOYE, les membres des groupements font des compétitions d’idées innovantes pour encourager la créativité, l’innovation sociale basée sur les besoins et réalités des communautés de la zone du projet. Les compétitions sont organisées au niveau communal, provincial, provincial et national (10 provinces dans lesquels le projet d’émancipation socioéconomique des adolescents et jeunes appuyé par l’UNICEF intervient).
La 2ème édition de la compétition d’idées innovantes (Innovation challenge) est aujourd’hui au niveau provincial. Après à peu près trois ans de travail ensemble, certains groupements se sont démarqués et sont capables de témoigner que « Qui ne risque rien n’a rien » et que « Union fait la force » à travers le pas déjà franchi.
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